Sur le mythe de Don Juan

Lisant le livre de Marañón, Don Juan et le donjuanisme, on s’aperçoit que le personnage a presque disparu avec l’ancienne morale sexuelle. Peut-être existe-t-il au fond des provinces des femmes à « séduire » ? (Sans doute y’en-a-t-il encore dans les pays musulmans, bien que ceux-ci soient maintenant taraudés par la télévision et Internet). Et cependant la séduction demeure.

Marañón se demande pourquoi Don Juan est espagnol ? Car le « séducteur » existe bien entendu dans toute l’Europe. Cela tiendrait d’abord aux traits spécifiques du caractère castillan, son culte du point d’honneur, et au fait que c’est en Espagne que fut créée l’Inquisition. Dans ce pays, l’honneur du mari ne prête jamais à la plaisanterie comme en Italie ou en France. Le sens du péché y est très fort (d’où par réaction, la puissance de l’anarchie dans le peuple).

L’autre aspect fondamental du mythe est la damnation après la mort. En cela le Don Juan espagnol est très différent du Don Juan italien, Casanova, qui a toutes les caractéristiques du personnage sauf le défi à Dieu. Aussi n’est-il finalement qu’un galopin doué pour la littérature (il écrivit ses excellents mémoires en français), alors que le Don Juan espagnol peut devenir moine (ce fut le cas de Miguel de Mañara).

Dans une civilisation dominée par la femme, qui n’hésite plus à se faire avorter, Don Juan est devenu un personnage de théâtre. Mais reste toutefois cet appel mystérieux : les femmes « libérées » ou « conformistes » répondent au séducteur sachant qu’elles seront abandonnées. C’est le dernier avatar du donjuanisme. Aucune psychanalyse n’a encore expliqué cet appel au mâle égoïste chez les grands mammifères. Quel est le physiologiste – ou le psychologue génial – qui nous donnera l’explication ?

Jean José Marchand

 

 

 

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